vendredi 14 novembre 2014

Merah Breivik, la poule et l'oeuf

En 2011, en Norvège, un inconnu du nom d'Anders Breivik exécutait à l'arme automatique presque soixante-dix jeunes sociaux-démocrates qui s'étaient regroupés sur une île pour l'université d'été de leur mouvement.

Son action, soigneusement planifiée, s'accompagnait d'un attentat à la bombe dans Oslo et de la diffusion d'un manifeste décrivant son geste.

Il l'expliquait par la volonté de défendre l'identité européenne, menacée par l'immigration et l'islam.

Ce type d'acte de la part de l'extrême droite était une première sur le continent et n'a pour l'instant pas fait d'émule.

Un an plus tard, en 2012, Mohammed Merah, un jeune Français d'origine algérienne, exécutait de sang-froid un groupe de militaires, puis plusieurs élèves d'une école juive avant de finir sous les balles de la police.

Ce n'était pas la première fois qu'un tueur fou frappait en France (on se souvient de Richard Durn en 2002).

Par ailleurs, les actes terroristes perpétrés par des islamistes sont hélas presque banals dans l'Hexagone depuis plus de 30 ans.

Mais le mélange des deux, sur fond d'antisémitisme, me semble avoir été assez nouveau (la tuerie de Mehdi Nemmouche à Bruxelles prouve hélas que ce n'était qu'un début).

Merah et Breivik, deux personnes aux parcours et profils différents, ont pour point commun d'avoir agi par croyance fanatique.

Comme beaucoup de jeunes musulmans européens, Merah avait fini par échouer sur les rives islamistes après de longues années d'errance, de délinquance et de frustration.

Il s'était convaincu qu'il était l'instrument de Dieu, voué à détruire tout ce qui n'était pas musulman, à commencer par les juifs.

Breivik, quant à lui, voyait sa civilisation comme menacée, assiégée par l'islam conquérant d'immigrés dont l'installation était favorisée et encouragée par les responsables politiques, à commencer par la gauche.

Son massacre avait pour but de châtier ces derniers et d'émettre un signal d'alarme auprès de la société.

Les Mohammed Merah de tout poil apportent indéniablement de l'eau à son moulin.

Combien de gens sont passés de l'autre côté devant les actions du tueur de Toulouse? Combien ont fini par désespérer de l'intégration des immigrés musulmans et/ou ont choisi Le Pen après ces tueries?

Et à l'inverse, les obsessions de Breivik vont forcément conforter les musulmans dans leur sentiment d'être exclus, rejetés et ostracisés, les encourager à rester soudés, à vivre entre eux.

Et cet isolement constitue évidemment un terreau idéal pour l'éclosion d'autres Merah.

La question du "Qui a commencé?" importe peu, Merah implique Breivik. Breivik implique Merah.

Dans la théorie du pire, dont l'Histoire nous dit qu'il est toujours possible, les Merah font des Breivik et les Breivik font des Merah, en une espèce de crescendo macabre dont l'aboutissement est un affrontement qui débouche au pire sur la disparition d'une des parties, au mieux sur une stricte séparation.

Cette cassure peut d'ailleurs être recherchée par des mouvements ou des leaders pour qui la victoire passe par l'anéantissement pur et simple de l'autre.

La tactique du FLN pendant la guerre d'Algérie, l'interminable guérilla nord-irlandaise, la stratégie des faucons israéliens, les combats sunnites-chiites qui ravagent la Syrie et l'Irak sont autant d'autres exemples de cette stratégie du pire.

Espérons que cette spirale saura être arrêtée chez nous et que nous n'aurais jamais à choisir entre les pestes brune et verte.

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