vendredi 11 octobre 2013

Orthodoxes et schismatiques (7) - Les autres christianismes

Outre les trois principaux rameaux que j'ai évoqués dans mes précédents posts, le christianisme comporte un très grand nombre de branches plus modestes et moins connues.

Ce post va en évoquer quelques-unes, avant de finir sur des mouvements dits restaurationnistes, c'est-à-dire qui se veulent restaurer la vraie église.

1. Les chrétiens d'orient

Sous ce vocable un peu générique, on regroupe un grand nombre d'églises, souvent très anciennes et issues de la partie byzantine de l'empire romain.

Très nombreuses et divisées, elles se distinguent de leurs homologues occidentales par différents aspects.

Je n'entrerais pas dans les détails théologiques (très souvent incompréhensibles pour le néophyte) mais on peut noter que ces différences portent sur la conception de la Trinité (certains nient la nature humaine du Christ, d'autres sa nature divine, certains hiérarchisent les natures, etc.) les rites, les langues, le rapport avec la papauté et parfois la traduction de la bible utilisée.

De plus les traditions de monachisme et d'érémitisme sont très présentes chez les chrétiens d'orient, qui furent les premiers chrétiens à les pratiquer, parfois dans des versions extrêmes qui peuvent rappeler les saddhus indiens.

Quelques exemples de chrétiens d'orient:

Les chrétiens arméniens

On dit que l'Arménie est le plus ancien état chrétien du monde. L'église arménienne a été rejetée par les catholiques et les orthodoxes pour un point de doctrine. Sa langue liturgique est le grabar, une forme ancienne de la langue arménienne.

Du fait de l'importante diaspora arménienne, cette confession est présente dans de nombreux pays.

Les coptes

C'est sans doute la communauté la plus nombreuse. Elle est présente essentiellement dans deux pays.

Premièrement en Égypte, où elle est la minorité religieuse la plus importante (de 7 à 10%) et où on la trouve aux deux extrémités de la société, chez les plus riches et les plus pauvres. Sa langue liturgique est le copte, langue héritée de l’Égypte pharaonique.

S'ils sont globalement tolérés, les différentes constitutions égyptiennes les discriminent en leur interdisant les postes de pouvoir et ils sont régulièrement l'objet de vexations allant jusqu'au pogrome.

Deuxièmement en Éthiopie, où elle représente un peu plus de 40% de la population. L'église orthodoxe éthiopienne s'est détachée de l'église copte proprement dite depuis les années 60, mais on continue à lui donner ce nom.

C'est la confession des classes dirigeantes, celle des ex-empereurs. Sa langue liturgique est le guèze, langue morte d'où est issue la langue principale du pays, l'amharique, et elle s'appuie sur une version particulière de la bible, qui comprend de nombreux livres considérés comme apocryphes par la plupart des autres confessions chrétiennes.

L’Éthiopie est considérée comme le deuxième pays le plus anciennement christianisé au monde.

Les maronites

Venus de Syrie en fuyant les invasions musulmanes, les maronites représentent la plus importante communauté chrétienne du Liban. Leur nom vient de Saint Maron, leur premier patriarche, celui qui élabora leur liturgie avant leur exil.

Leur langue liturgique est majoritairement l'arabe, mais le syriaque, langue ancienne apparentée à l'araméen, est également utilisé.

Les maronites, qui se sont rattachés à la papauté, ont joué et jouent un rôle moteur dans le pays, qu'ils ont très longtemps dominé et où ils ont servi de pont avec l'occident.

Mais l'augmentation de la population musulmane, notamment due à l'afflux de réfugiés palestiniens, ainsi que la guerre civile, l'invasion syrienne et l'instrumentalisation des chiites pilotée par le Hezbollah et l'Iran ont fait perdre aux maronites leur position de force.

A l'instar des autres communautés du pays, ils vivent désormais dans une sorte de "paix armée", gardant jalousement leurs positions et territoires.

Leur diaspora dans le monde est très importante.

Les chaldéens et les assyriens

Ces deux communautés, très anciennes (les assyriens sont les héritiers de l'antique église nestorienne), vivent essentiellement en Irak et en Syrie.

Elles utilisent le syriaque comme langue liturgique et les villages où vivent leurs membres ont parfois l'araméen comme langue maternelle.

Ces églises sont dans une situation tragique aujourd'hui, minorités coincées dans des pays livrés à la guerre civile et proie des fondamentalismes islamiques qui les persécutent.

Le nombre de leurs fidèles ne cesse de baisser, une partie sans cesse plus importante émigre (depuis la seconde guerre du Golfe, le nombre des chrétiens d'Irak a été divisé par deux), et leur langue, qu'on dit par abus être celle du Christ, n'aura probablement plus de locuteurs d'ici une ou deux générations.

2. Les anglicans

L'anglicanisme est le nom de la religion officielle du Royaume-Uni. Cette religion est née d'un conflit entre le roi Henri VIII et le pape qui refusait l'annulation de son mariage. Le roi décida alors la rupture avec Rome et devint le chef de l'église d'Angleterre.

(On peut noter que des conflits de ce type entre les pouvoirs temporels et papauté ont eu lieu un peu partout eu Europe: gallicanisme en France, querelle des guelfes et des gibelins dans le saint empire romain germanique et en Italie, etc.).

Suite à cette rupture, qui s'accompagna d'une violente répression des catholiques, une nouvelle église se structura, à mi-chemin entre le protestantisme, auquel elle emprunta nombre de points de doctrine et le catholicisme, dont elle conserva notamment la hiérarchie.

Son primat est l'archevêque de Canterburry, et son chef le souverain anglais, donc actuellement la reine d'Angleterre.

Aujourd'hui cette église, qui a essaimé dans le monde entier en suivant l'expansion britannique, fonctionne de manière très largement décentralisée: on parle d'églises anglicanes au pluriel.

Pour terminer, je citerai deux rameaux particuliers du christianisme, deux églises qui se revendiquent seules chrétiennes mais ne sont pas forcément reconnues comme telles par les autres confessions, ce qui ne les empêche pas d'avoir de nombreux fidèles de par le monde et une assise territoriale confortables.

- Les mormons

Cette religion, dont le nom officiel est "Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours", a été fondée au XIXième aux États-Unis par Joseph Smith.

Celui-ci aurait reçu la visite de Dieu et de Jésus qui lui auraient indiqué que l'église de son temps s'étant éloignée de la vraie doctrine chrétienne, il serait celui qui la rétablirait dans la vérité.

Quelques temps après, c'est un prophète, Moroni, qui lui serait apparu et l'aurait guidé vers un ouvrage caché sur une colline, le livre de Mormon.

Ce livre raconte l'histoire de juifs installés dans l'Amérique précolombienne, et celle de leur chef, le prophète et guerrier Mormon.

Ce manuscrit vient compléter la Bible et constitue l'une des bases de la théologie des mormons (on trouvera aussi ultérieurement des écrits d'autres prophètes).

En raison de leurs croyances et de leurs mœurs (jusqu'en 1889 ils furent notamment polygames) les mormons furent dans un premier temps persécutés par les autorités américaines, parfois massacrés.

Ils s'installèrent alors en Utah, près du Lac Salé qui a donné son nom à la capitale de l'état (Salt Lake City), dans une région désolée au climat extrême où ils réussirent à s'acclimater au prix d'efforts très importants et d'une solidarité sans faille.

L'église mormone a depuis prospéré et s'est insérée dans la société américaine au point d'avoir fourni le candidat républicain à la dernière élection présidentielle. Leurs chefs ont abandonné la polygamie (à part une petite minorité hors-la-loi) et la discrimination raciale des débuts.

Pour les mormons l'alcool, le thé, le café et le tabac sont strictement prohibés. Il faut œuvrer à la diffusion de la bonne parole (d'où un réseau de missionnaires particulièrement zélés), et donner 10% de ses revenus à l'église.

Un aspect insolite de leur doctrine est l'accomplissement des sacrements pour leurs ancêtres morts, ce qui pousse les mormons à baptiser post mortem tous leurs ascendants identifiés.

Cette tâche énorme a conduit la communauté à devenir l'un des spécialistes mondiaux les plus performants en généalogie.

En effet, une partie importante des ressources de l'église est consacrée à remonter dans le temps pour rendre mormone les familles défuntes de leurs membres.

Les mormons sont ainsi à l'origine d'une norme XML pour les fichiers informatiques de généalogie (la norme GEDCOM) et de FamilySearch, l'un des sites les plus populaires de généalogie.

Un peu comme les protestants évangéliques, les mormons sont une communauté très soudée, très impliquée dans le monde, très moderne dans ses moyens et prosélyte.

- Les témoins de Jéhovah

Le mouvement des Témoins de Jéhovah est lui aussi né aux États-Unis, dans la deuxième moitié du XIXième siècle (1870).

Fondé par un protestant influencé par l'adventisme sous le nom d’Étudiants de la Bible, le mouvement se veut une restauration de la vraie doctrine chrétienne.

Les témoins de Jéhovah ont pour caractéristique une fermeture extrême au reste du monde, considéré globalement comme l’œuvre de Satan. D'où une tendance à vivre en vase clos qui les fait régulièrement accuser de sectarisme.

La discipline au sein du mouvement est très stricte, la vie privée n'existe pour ainsi dire pas, toute contestation ou remise en cause est combattue, et toute sortie du mouvement s'accompagne d'un rejet total de la personne, de l'interdiction de garder des liens avec elle, y compris familiaux.

Neutres politiquement, ils refusent tout ce qui a trait à l'état, comme le service militaire, le vote ou l'hymne national, ce qui leur a longtemps valu des ennuis, ainsi que les transfusions sanguines.

Ils rejettent également les fêtes chrétiennes traditionnelles (Noël par exemple), les anniversaires, et d'une manière générale sont complètement opposés à tout œcuménisme ou rapprochement avec quelque autre religion ou idée que ce soit.

Convaincus de l'imminence du retour du Christ, ils ont annoncé plusieurs dates pour la fin du monde (la dernière fois c'était en 1975), le dépassement de cette date entrainant généralement une crise au sein du mouvement, mais jamais sa disparition.

Malgré leur rejet du monde, ils considèrent de leur devoir de transmettre leur message à leurs contemporains.

L'accent est donc mis sur un prosélytisme zélé, que chacun a pu constater en croisant un jour un ou plusieurs témoins de Jéhovah tentant de le convaincre ou de lui fournir un exemplaire de la revue "La Tour de Garde".

Le mouvement a sa propre traduction de la Bible, parfois contestée par les autres chrétiens, avec lesquels ils ne sont pas d'accord sur plusieurs points de doctrine (ils récusent notamment le dogme de la Trinité). Ils pratiquent le baptême biblique par immersion à l'âge adulte.

Du fait de leur intransigeance, de leur fermeture et de leur désintérêt vis-à-vis de "La grande Babylone" que représente le monde extérieur (ils n'ont jamais cherché à être reconnus comme une église par exemple), les témoins de Jéhovah sont la plupart du temps en butte à la méfiance ou à l'hostilité, voire à la persécution du reste de la population.

Après ce petit tour d'horizon des différentes façons d'être chrétien, je vais m'attaquer à la troisième grande religion abrahamique, l'islam.

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